Jan a dit

Etranger vivant dans le Sud-Ouest, aussi appelé "France profonde", je suis ce qu'on pourrait appeler un râleur. Ou tout simplement quelqu'un doté d'un esprit critique. Les avis sont partagés. Et c'est justement pour partager mes avis avec vous, que j'ai créé ce blog. En me faisant presque toujours aider des illustres duettistes Paule & Mick pour la rédaction d'articles...

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samedi, octobre 31, 2009

Crise économique – Halte au mépris

Je suivais l'émission "Vous aurez le dernier mot" de Franz-Olivier Giesbert, où Jacques Attali ressortait sa rengaine sur le besoin d'instaurer un organe mondial de régulation pour contrer les dérives du capitalisme financier.
L'idée qu'on ne peut plus laisser les financiers être seuls maîtres à bord fait son chemin, et tombe sous le sens.
Mais faut-il pour autant doter notre planète d'une sorte de gendarme financier mondial ? Je ne le pense pas, d'abord parce que son efficacité sera proche du zéro absolu, puisque rien n'est entrepris pour traiter le mal à sa racine.
Le problème est bien là, et évoquer la volonté de moraliser les marchés financiers, sans intervenir sur les fondamentaux de son fonctionnement, tient au mieux de l'angélisme, au pire du cynisme politicien le plus méprisable.
Comme elles savent le faire quand elles s'acquittent de leur véritable tâche sans se laisser gouverner par le seul audimat, les chaînes publiques généralistes nous ont cette semaine gratifié de quelques documentaires de grande qualité. Tels "La mise à mort du travail" sur France3 et "1929" sur Arte.
En se penchant sur le cas de Fenwick et le fonctionnement des LBO (Leveraged Buy Out) si chers en particulier à la firme de "private equity" KKR, ces deux documentaires ont très clairement démonté et expliqué un mécanisme inéluctable qui perdurera tant que ne seront pas prises des mesures de fond.
Comme tant d'autres, KKR est sans cesse à l'affut, tel le rapace qu'il est en réalité, d'entreprises bénéficiaires mais offrant selon ses critères un "potentiel" de rationalisation, de rentabilisation, ou pour le dire comme un des intervenants, Frédéric Lordon, un potentiel à "dégorger du cash" pour "se payer sur la bête".
Dans ses principes, ce mécanisme est d'une simplicité déconcertante. Un fonds, tel que KKR, rachète sa proie avec une mise propre limitée mais suffisante pour s'assurer une minorité de blocage, donc la mainmise sur la gestion de la proie, complétée par un fort endettement pour le reste, qui servira donc de "levier".
La proie est alors pressée comme un vulgaire citron, jusqu'à produire des rendements de 15 à 20% l'an. Qui serviront à rembourser la colossale charge des dettes.
Après quelques années de pressurisation, et le remboursement de la dette, éventuellement accompagnée de la revente des "bijoux de famille", la proie exsangue mais ainsi détenue en totalité, est revendue, assez souvent via une introduction en Bourse, d'autant plus aisée vu les mirobolants taux de rendements annuels affichés au cours des quelques années précédant cette "réalisation d'actif".
Une occasion, dans de nombreux cas, de remettre une seconde couche, puisque ces actifs, qui vont se retrouver dans des portefeuilles de petits porteurs, s'avèrent souvent incapables de reproduire ces flamboyants bénéfices, et finissent par s'écrouler comme les géants aux pieds d'argile qu'en auront fait le vautour.
Mais comment prétendre "moraliser" la finance, si de telles stratégies d'investissement demeurent possibles ? L'iniquité de la chose devrait sauter aux yeux, et si on peut raisonnablement douter de l'imbécillité et de la stupidité de nos gouvernants, il faut donc se résoudre à conclure à leur coupable complicité. Il est en effet inutile d'avoir fait de hautes études pour comprendre qu'une exigence de rendements s'élevant au triple (en période de plein emploi comme les "trente glorieuses") voire au décuple (en temps "normal") de la croissance réelle ne peut qu'aboutir à une destruction pure et simple du système.
Sans compter que la réalisation de telles marges revient en fait à surfacturer dans des proportions illicites le service ou le bien vendu, et donc s'apparente ni plus ni moins à une escroquerie organisée.
L'indécence de ces stratégies du rendement à outrance réside donc dans l'absence de juste redistribution des richesses via une répercussion des gains de productivité réalisés à tous ceux et celles qui y ont contribué.
L'unique moyen de barrer la route à ce type de management destructeur, caractérisé par le mépris, des clients, du personnel, des fournisseurs et sous-traitants ou encore de l'environnement de l'entreprise au propre comme au figuré, ne consistera qu'à mettre une fois pour toute hors la loi tout rendement s'écartant du niveau raisonnable moyen. En ceci je rejoins Lordon et son "SLAM", sauf en ce qui concerne son application, puisque la solution de confiscation fiscale APRES réalisation de rendements supérieurs à cette norme n'empêche pas la dérive destructrice dont s'accompagne ce type de management malsain.
Ceci étant, un rendement peu ou prou équivalent avant et après l'acquisition, viderait de son attrait ce type d'opérations financières, et pourrait à terme mener à sa disparition, pour le plus grand bien des clients, du personnel ou des fournisseurs et sous-traitants, comme de l'entreprise elle-même.

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